jeudi, mars 30, 2006

La vieille Eneïde !

Aujourd'hui, les Français n’ont que deux cent ans et des poussières....
L’âge de leur Révolution. Un âge trop ingénu et trop radical pour incarner une vérité universelle.
Dans les Balkans, on apprend vite à vieillir. A condition de vouloir accepter l'héritage de notre civilisation pour tenter d'en dessiner les contours à venir.
Notre histoire européenne commence il y a trois ou quatre mille ans, au moins. Il nous faut accomplir cet effort de vieillir jusqu'au point de pouvoir raconter cette histoire comme si c'était "notre propre autobiographie" (Sloterdijk).
Sans cela, comment perfectionner notre identité commune, comment la métamorphoser ?
Ce comment impliquant un pourquoi, un pour qui et un où ?


Ici, dans les Balkans, tout, à tout moment, nous parle des Empires : les langues, les cultures, les politiques, les architectures, les successions de déplacements de frontières, et même la cuisine !
Rien n'évoque nos universaux révolutionnaires juvéniles.

Wer nich von dreytausend Jahren
Sich weiB Rechenschaft zu geben,
Bleib im Dunkeln unerfahren,
Mag von Tag zu Tage leben
.
Goethe, Le Divan
(Celui qui, de trois mille ans, ne sait pas rendre compte, qu’il demeure ignorant et dans les ténèbres, qu’il vive du jour au lendemain.)


Vieillir, c’est accepter de porter le poids de la complexité et refuser les engagements binaires.
Refuser le binaire exclusif, l'un ou l'autre pour revendiquer le duel, l'un et l'autre, l'un avec l'autre.
Les démographes nous disent : « l’Europe vieillit », les anthropologues répondent : « Mais où sont passés les adultes en Europe ? », les philosophes pourraient s'interroger : « Pourquoi cet oubli des vieilles Eneïdes sans lesquelles point d’avenir européen ? »

1 Commentaires:

At 31/3/06 10:29, Anonymous Anonyme a dit...

Votre texte est un bon éveilleur!
Toutes sortes de réflexions me sont venues à l'esprit en le lisant. Historiquement, d'abord: la France est effectivement un pays jeune...et très fragile! Combien de restaurations, d'empires, de révolutions et...de
républiques depuis la Révolution!
Résultat, des élites qui continuent
à se comporter comme en royauté tout en délivrant un discours républicain, auquel très peu croient, des politiciens pour qui le seul idéal est de se faire réélire! A comparer avec la Grande-
Bretagne qui, tout en restant une royauté, a su bâtir une authentique démocratie, par petites touches successives, avec
une constitution qui n'est même pas écrite! Ou avec la Suède, encore une royauté, mais où la famille royale se déplace avec les transports publics et où toute décision est le fruit d'un consensus longuement mûri.
Autre type de réflexion: le rôle de la tradition, qui est un peu comme la langue d'Esope. Tant que la tradition fournit un ciment politico-social, elle est positive.
Mais elle devient haïssable lorsqu'elle colporte au travers des âges de vieilles haines, de vieux préjugés, de vieilles superstitions.Il appartient alors aux élites intellectuelles et politiques d'y apporter remède.
Pour conclure sur la France, le fait d'avoir voulu délivrer un message universel alors que son peuple et ses élites fonctionnent aux antipodes de celui-ci nous vaut un discrédit général et amplement mérité. Quand ramènerons-nous nos idéaux au niveau de la vie réelle?

 

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