mercredi, mars 22, 2006

Basic CPE



A Belgrade, il suffit qu’un air tiède de printemps souffle deux jours durant pour provoquer une explosion prometteuse de bourgeons aux arbres qui ornent les rues.
A Paris, il suffit parfois qu’un gouvernement sente l’arrivée des ces jours dolents et toniques à la fois, propices aux désirs de rébellions festives, pour qu’il sorte de ses tiroirs une mesure dédiée à la jeunesse (que les intéressés n’attendent, ni ne réclament) , que celle-ci ressentira aussi bien discriminatoire que provocatrice : ainsi explosent les bourgeons lycéens, étudiants et autres vertes pousses prometteuses dans le printemps français.
« April in Paris », Mai 68 …tout l’imaginaire politique printanier de la France !
Cet imaginaire a bouleversé jusqu’à Sharon Stone, de passage à Paris, qui a pris vivement le parti de la jeunesse contre le CPE.

Sincèrement, je ne connais du CPE que ce que j’en ai lu dans la presse. Autant dire rien de fiable. Je n’ai pas eu la loi entre les mains. Ce n’est pas bien du tout. Mais cela ne m’empêche pas, comme Sharon Stone, d’éprouver beaucoup, beaucoup de tendresse pour les jeunes manifestants.
A la lumière encore rayonnante de mes propres 17 ans et de mes souvenirs adolescents.

On ne dira jamais assez l’apprentissage formidable que constituent les manifestations de printemps : une éducation politique et citoyenne inévaluable.

Apprendre à lire des textes de loi, à raisonner, exposer, argumenter, convaincre, expliquer, à rédiger des tracts, des communiqués de presse, des déclarations d’Ag, des motions de synthèse, à organiser des réunions de groupe et à gérer leur dynamique, à planifier des actions collectives, à négocier avec les autorités, les organisations politiques et syndicales institutionnelles toutes les autorisations de parcours et la mise en place des dispositifs de sécurité, à tisser un réseau national. Découvrir le pouvoir, le contre-pouvoir, la provocation, la violence pour de vrai, les casseurs, les infiltrations, les désillusions, les négociations, la nécessité des compromis, le pragmatisme…Tout ceci apporte à ceux, nombreux, qui se lancent dans ces actions avec sérieux et enthousiasme, une expérience de la démocratie participative irremplaçable!

Et puis comment ne pas évoquer le charme romantique irrésistible des rencontres passionnées dans des joutes intellectuelles fécondes (toutes neurones bien neuves aux aguets), des nuits blanches d’occupation musicales et enfumées, des fuites précipitées sous des porches obscurs, des marches interminables main dans la main, des regards noyés de larmes (fumée des lacrymos) se découvrant au dessus d’un foulard mal noué, des enthousiasmes partagés et des fous rires de cet âge du devenir et de tous les possibles.
La politique heureusement s’apprend aussi dans le désir et le plaisir. Les Lumières, le libertinage et les chambardements s’entendent si bien. Le puritanisme (affiché) n’accompagne que les restaurations et les totalitarismes.

Enfin, le tragique aussi. Ma génération n’oubliera jamais Malik Oussekine, ni le plus jamais ça qui résonne encore à nos oreilles.

Sharon Stone a succombé à cet enivrement politique si français , je la comprends…
On n’est pas sérieux quand on a 17 ans et qu’on a des tilleuls verts sur la promenade…
On s'enivre de révolution et on en devient enivrant quand on a 17 ans , et qu’on ne sait pas encore tout d' Arthur R…